Pomone est une déesse romaine qui veille sur les fruits et les jardins. Dans son célèbre ouvrage intitulé les Métamorphoses, le poète latin Ovide raconte les amours de cette dernière avec Vertumne, dieu des saisons et des arbres fruitiers, le couple symbolisant la fertilité et l’automne. La sculptrice Germaine Richier bouscule ici cette façon de représenter la déesse, célèbre au 18ème siècle, en faisant de la divinité une robuste jeune femme, campée sur ses grands pieds. Des doigts de sa main gauche, la gourmande pousse un fruit dans sa bouche. Le déhanchement est discret mais fondamental dans la statuaire de l’artiste. Le mouvement de torsion suffit à animer la surface du corps et réveille la lumière sur le métal sombre.
Le traitement rugueux de la surface situe l’œuvre dans le contexte du matiérisme de l’après-guerre, celui de Fautrier et de Giacometti, Germaine Richier révélant des possibilités expressives de la figuration, entre puissance et légèreté. Sa sculpture en bronze, technique qu’elle privilégiait, fut fondue par Susse frère, fonderie à laquelle Richier restera fidèle jusqu’à sa dernière œuvre, en 1959. Germaine Richier étudia la sculpture aux Beaux-Arts de Montpellier dès 1920, année de la création du mouvement artistique cinétique russe et de la première exposition Dada à Berlin. À l’Académie de la Grande Chaumière à Paris, elle fut l’ unique élève de Bourdelle entre 1926 et 1929, date de la mort de ce dernier. Elle s’appuya dans sa pratique sur une technique traditionnelle, dans un rapport humaniste dont elle saura prendre toute la liberté dans sa sculpture.